Toujours aussi productif à 27 ans que lorsqu'il en avait 17, le prodige Ninho vient de dévoiler son quatrième album solo, « NI », en créant une fois de plus l'événement. Comme d'habitude, c'était lui la sortie la plus scrutée et attendue de l'année, et alors que le projet a déjà fait un disque d'or, c'est l'heure de se pencher un peu plus en détails sur l'album pour voir s'il a rempli toutes les attentes.

« NI », une nouvelle page pour Ninho

On peut dire que Ninho était très attendu après l'énorme carton de « Jefe », son album sorti fin 2021 et dont le succès a été tellement rapide et tellement retentissant que ça lui a d'ailleurs apporté quelques rivalités dans le rap game (Booba, pour ne citer que lui). Mais le rappeur a pris le temps avant de revenir avec un nouveau projet, sachant qu'il était désormais auréolé d'un statut particulier, celui de leader de l'industrie rap. Un statut mérité, puisqu'il était non seulement un des artistes les plus productifs, mais aussi les plus certifiés (presque 300 disques ou singles d'or, de platine et même de diamant). Avec « NI », il fallait donc qu'il mette la barre encore plus haute, en s'ouvrant pourquoi pas à d'autres horizons, et c'est ce qu'il a fait. Notamment en s'offrant un véritable casting de stars internationales pour la tracklist de son album. C'est d'ailleurs une véritable première historique dans le rap français, car jamais un rappeur FR n'aura eu autant de gros noms mondiaux sur son album : Lil Baby et Central Cee, tous les deux au sommet de la hype depuis quelques années, ainsi que Omah Lay, chanteur nigérian aux dizaines de millions de vues, et Ayra Starr, chanteuse nigériane qui a elle aussi énormément de succès. Un vrai casting 5 étoiles venu pour épauler Ninho pour son quatrième album solo.

On peut d'ailleurs dire que c'est une réussite, puisque le featuring avec Lil Baby, « Blue Story » et celui avec Central Cee, « Eurostar », figurent tous les deux dans les titres les plus streamés de l'album. Un album qui a décroché un disque d'or en à peine 13 jours, du très banal pour Ninho, parfois même habitué à mieux que ça niveau chiffres. Au niveau du contenu, le disque se veut assez intimiste et on retrouve le rappeur souvent en train de se livrer par petites bribes. Ça commence d'ailleurs dès le premier morceau de l'album, « La vie de Johnny ». On retrouve aussi beaucoup de mélodies, de top lines, de flows un peu chantés, domaines dans lesquels NI excelle quasiment depuis ses débuts (on vous conseille « Bad » dans ce mood-là). Et pour ceux qui sont un peu plus fans du Ninho version « Binks to Binks » en mode kickage et arrachage de micro, il y aura aussi ce qu'il vous faut : « Yo moko oyebi », « 25 G », « Grio », les titres plus streets ne manquent pas. Au milieu de tout ça, quelques morceaux un peu hybrides, des OVNI comme le featuring avec Central Cee. On a donc globalement un beau panorama de tout ce que Ninho sait faire au micro ou à peu près, on regrette juste l'absence de featurings bien énervés avec quelques grosses têtes du Rap FR comme Niska ou Sadek, avec qui le rappeur a souvent collaboré. Même s'il est vrai que sur « Jefe », l'album précédent, il n'y avait tout simplement aucun feat.

Des chiffres en baisse, mais un objectif atteint ?

Vient maintenant de nous interroger pour savoir si l'album répond aux attentes du public. Au vu des chiffres, à savoir 18 000 copies écoulées en 3 jours et un disque d'or décroché en moins de 13 jours, on serait tentés de répondre oui. Car ces chiffres fraient pâlir d'envie à peu près n'importe quel autre rappeur du game, mais voilà, il s'agit de Ninho. Et avec « NI », il signe le moins bon démarrage de tous ses albums, derrière « Jefe », « Destin » et « Comme Prévu » (dans l'ordre). Des chiffres qui s'expliquent par plusieurs facteurs : le premier, étant la date de sortie, fin juin, très proche de l'été alors que la plupart des radios et des plate-formes ont déjà bouclé leurs playlists pour les vacances. Et qui dit sortie pendant l'été, dis forcément moins de visibilité pour sa promotion, puisque tout le monde part au soleil et très peu de gens regardent les interviews sur la plage. Si on ajoute à ça que l'album est sorti quelques jours après la mort de Nahel qui a bien secoué le pays, on imagine que les  jeunes avaient autre chose en tête que d'écouter de la musique. Quoiqu'il en soit, tous ses obstacles n'auront pas empêché Ninho de décrocher son disque d'or, et rapidement.

Un autre élément qui fait qu'on a peut-être moins entendu parler de son projet, c'est le coté très homogène de l'album. Avec un Ninho mélancolique, qui parle d'amour, de regrets, du temps d'avant, et un Ninho énervé et déterminé, qui rappe comme le patron qu'il est devenu. Mais ce qui manque, c'est peut-être un single qui sorte du lot et qui se détache du reste. Mais il n'y a pas encore un mois qui est passé, et on a bon espoir que certains morceaux comme « Bad » finissent par trouver leur public et pourquoi pas se faire un chemin jusque dans vos soirées d'été, avec son côté rythmé et mélodique très efficace. Un album qui est donc peut-être plus fait pour les fans inconditionnels du rappeur et moins pour attirer le public le plus large possible, donc. Quoiqu'il en soit, dites-vous qu'avec cet album, NI a accompli un objectif crucial : celui de s'exporter à l'internationale. Grâce à ses featurings avec les artistes américains, anglais ou nigérians, il s'ouvre des portes comme aucun autre rappeur français auparavant. Une mentalité de visionnaire donc, avec une volonté d'explorer de nouveaux horizons, comme on avait pu le deviner chez lui lors de notre collaboration il y a quelques années. Pour toutes ces raisons, on adresse donc un grand bravo à Ninho et on lui souhaite bonne chance pour la suite, qui promet d'être encore plus intéressante.